Alban Aupée est « Meilleur Ouvrier de France » (MOF), récompensé en 2015 dans la catégorie des métiers des services à l’énergie. A l’occasion de l’ouverture du concours « Un des Meilleurs Ouvriers de France », en mars 2025, il nous livre ici son expérience. La préparation du concours, ce qu’il a apporté à sa carrière, ses conseils pour les jeunes qui souhaitent se lancer… Découvrez son témoignage.

Pouvez-vous nous parler de votre parcours ?
Alban Aupée : « Mon parcours professionnel est étroitement lié à mon histoire personnelle. En y repensant, je ne peux m’empêcher d’évoquer mon père, qui m’a initié très tôt à la mécanique automobile. C’est grâce à lui que j’ai développé un goût pour le travail manuel, ce qui a posé les bases de mon métier.
Après mes études, mon véritable début dans la profession remonte à 1998, lorsque j’ai intégré l’entreprise allemande WEISHAUPT, spécialisée dans la fabrication de brûleurs et de systèmes de contrôle-commande. C’est là que j’ai appris les fondamentaux de mon métier, et probablement aussi développé une véritable passion. Une rencontre a été déterminante pour moi : Joachim, un technicien d’une compétence exceptionnelle, aujourd’hui à la retraite, qui m’a énormément appris.
Par la suite, j’ai exploré d’autres expériences avant de rejoindre Dalkia en 2003. Cette entreprise m’a permis de découvrir un autre aspect du métier, notamment la gestion de l’énergie. J’y ai aussi préparé et passé le concours de Meilleur Ouvrier de France (MOF), une étape marquante de ma carrière.
Après l’obtention du titre, j’ai ressenti le besoin de changement. Avec Dalkia, nous n’avons pas trouvé d’accord correspondant à mes nouvelles aspirations, alors j’ai décidé de partir vers de nouveaux horizons. En 2019, j’ai intégré Babcock Wanson, d’abord en tant que technicien, afin de mieux comprendre leur matériel et leur fonctionnement, avant de passer chargé d’affaires grâce à Fabrice qui m’a fait confiance.
Ce poste me permet de faire le lien entre la technique et le commerce, tout en conservant un contact direct avec la clientèle.
Je suis fier d’évoluer au sein de cette entreprise française, qui rayonne à l’international et possède une usine historique à Nérac (Lot-et-Garonne). En 2026, une nouvelle usine verra le jour, ce qui contribuera au développement de nos solutions techniques.
Notre entreprise est spécialisée dans la production de vapeur pour le secteur industriel, mais aussi dans le traitement de l’air, de l’eau et des COV (Composé Organique Volatil). L’innovation est au cœur de notre métier, notamment avec des chaudières connectées capables d’analyser leurs performances en temps réel et d’envoyer des bilans énergétiques aux exploitants. Un de nos experts, Gaëtan, est un acteur clé dans le développement de ces technologies. »

Comment décririez-vous votre expérience du concours MOF ?
Alban Aupée : « Je diviserais mon expérience en trois étapes :
- L’inscription : C’est probablement le moment le plus difficile, car il faut oser se lancer. Le doute et la peur de l’échec sont omniprésents, mais une fois inscrit, il n’y a plus de retour en arrière.
- La préparation : Cette phase est intense, mais aussi très enrichissante. J’ai dû développer des compétences en informatique et en automatisme. Pendant un an, j’ai travaillé sur une thèse, réalisé des études théoriques appliquées au terrain, et préparé un dossier que j’ai présenté devant un jury. Après un exposé de 20 minutes, j’ai accompagné les examinateurs sur mon site de travail et présenté concrètement mes recherches.
- L’après-concours : Lorsque j’ai reçu la confirmation de mon titre de Meilleur Ouvrier de France, j’ai dû relire plusieurs fois le courrier avant d’y croire. J’ai même demandé à ma femme de me confirmer que je comprenais bien ! Cette reconnaissance m’a donné envie d’évoluer professionnellement, mais aussi généré de nouveaux défis, comme gérer le regard des autres, parfois bienveillant, parfois jaloux. J’ai alors ressenti le besoin de changement, ce qui m’a conduit à quitter mon entreprise pour repartir sur de nouveaux projets. »

Quelles sont les qualités nécessaires pour participer au MOF ?
Alban Aupée : « Deux qualités essentielles me viennent à l’esprit :
- L’amour du métier : La base de tout, c’est d’aimer la technique et d’avoir de solides compétences, notamment en électricité.
- L’envie d’apprendre : Avoir des connaissances ne suffit pas, il faut être curieux, chercher des solutions et savoir s’entourer des bonnes personnes pour progresser. »
Qu’est-ce qui vous a le plus stimulé pendant la préparation du concours ?
Alban Aupée : « Ce qui m’a le plus motivé, c’est la technicité. Chercher des solutions, comprendre de nouveaux concepts, repousser mes limites… C’est un métier en perpétuelle évolution, et c’est cette dynamique qui le rend passionnant.
Passionné de sport automobile, j’aime faire un parallèle entre nos métiers. Dans le sport automobile de haut niveau, les mécaniciens et les ingénieures sont perpétuellement à la recherche de la performance pour aller toujours plus vite, toujours plus loin et consommer moins et mieux. »
Ce qui m’a le plus motivé, c’est la technicité. Chercher des solutions, comprendre de nouveaux concepts, repousser mes limites… C’est un métier en perpétuelle évolution, et c’est cette dynamique qui le rend passionnant.
Comment les métiers de l’énergie ont-ils évolué depuis vos débuts ?
Alban Aupée : « L’évolution majeure concerne l’automatisation et la collecte des données. Les appareils de mesure et les outils de suivi énergétique se sont considérablement améliorés. Aujourd’hui, grâce aux chaudières connectées fonctionnant aux énergies fossile et électrique conçues et fabriquées par Babcock Wanson, nous pouvons obtenir des analyses précises de leur fonctionnement et de leurs consommations et ainsi optimiser leurs efficiences.
Aujourd’hui, l’efficacité énergétique et la gestion de l’impact environnemental font partie de l’ADN de Babcock Wanson.
L’intelligence artificielle est un sujet récurrent, mais je reste convaincu que l’homme doit conserver une place centrale dans la gestion énergétique. L’IA peut nous assister, mais elle ne remplacera jamais totalement l’expertise humaine. Sauf erreur de ma part, l’IA ne possède pas encore notre système sensoriel et nos neuf sens. »
Quelles innovations techniques vous semblent les plus prometteuses pour l’avenir ?
Alban Aupée : « C’est une question difficile. Je ne crois pas au 100 % décarboné, mais je pense que la nouvelle génération trouvera les solutions du futur. L’avenir reposera sur un équilibre entre intelligence artificielle et savoir-faire humain. »
Un jeune qui s’inscrit à ce concours démontre déjà une motivation et une passion pour son métier. Il découvrira des compétences insoupçonnées et développera son savoir-faire. L’apprentissage par l’expérience est la meilleure des formations.
Le concours MAF (Meilleur Apprenti de France) peut-il être un tremplin pour les jeunes dans les métiers de l’énergie ?
Alban Aupée : « Oui, sans aucun doute. Un jeune qui s’inscrit à ce concours démontre déjà une motivation et une passion pour son métier. Il découvrira des compétences insoupçonnées et développera son savoir-faire. L’apprentissage par l’expérience est la meilleure des formations. »
En quoi ces concours peuvent-ils valoriser la filière de la maintenance en efficacité énergétique, notamment le MOF et le MAF ?
Alban Aupée : « Aujourd’hui, on entend beaucoup de discours politiques, mais concrètement, les choses évoluent peu. Pourtant, l’avenir repose sur les jeunes. Ce n’est pas seulement mon opinion, c’est une réalité partagée par beaucoup.
Ces concours leur offrent l’opportunité de développer leurs compétences et de trouver des solutions pour améliorer l’efficacité énergétique. L’objectif est simple : consommer de manière plus intelligente et responsable. Moins consommer pour obtenir davantage.
Les jeunes d’aujourd’hui n’ont pas encore l’expérience des anciens, mais ils l’acquerront en comprenant d’où l’on vient et en réfléchissant à la direction à prendre. La question est de savoir comment y parvenir, mais j’ai confiance en eux : ils trouveront les solutions. Après tout, l’être humain a toujours su s’adapter et innover. Il n’y a pas de raison que cela change. »

Quels conseils donneriez-vous aux jeunes souhaitant s’engager dans cette filière, au-delà des concours ?
Alban Aupée : « Le premier conseil, c’est d’oser et de croire en soi. Participer à un concours, c’est se confronter à ses propres capacités et réaliser qu’on est capable de bien plus qu’on ne le pense. C’est une véritable prise de confiance.
Mais ces concours ne sont pas seulement des épreuves : ils représentent aussi une reconnaissance nationale. Ils valorisent le savoir-faire et les compétences des candidats. Et au-delà de la reconnaissance professionnelle, il y a aussi la fierté de leurs proches. Voir ses parents fiers de son parcours, c’est une récompense précieuse. »
« Mon message aux futurs candidats est simple : vous n’avez rien à perdre. C’est une expérience enrichissante qui apporte énormément sur le plan personnel et professionnel. L’épanouissement est au cœur de ce concours, et rien que pour ça, ça vaut le coup. »
Que diriez-vous à des salariés qui hésitent encore à s’inscrire au concours MOF ?
Alban Aupée : « Mon parcours s’est déroulé en deux étapes.
À l’époque, chez Dalkia, j’ai eu plusieurs chefs, dont un plus jeune que moi, Hervé. Parfois, ce n’était pas simple pour moi d’accepter des directives d’un jeune diplômé qui n’avait pas encore l’expérience du terrain. Son message pouvait être brut, et nous, les anciens, avons parfois du mal à le recevoir.
Un jour, Hervé m’a tendu une feuille d’inscription au concours MOF. Pourquoi moi ? Même si nous avions des désaccords, il a dû voir en moi un potentiel. J’ai pris la feuille, je l’ai lue… et ça m’a fait peur. Je me suis dit : « C’est impossible, c’est trop dur. »
Mais l’idée a fait son chemin. Quelques années plus tard, discrètement, avec le soutien d’un autre chef, j’ai fini par m’inscrire. J’ai commencé à me préparer seul, sans même informer mon entreprise. Puis, à un moment donné, j’ai dû leur en parler, car il fallait me rendre à Paris pour rencontrer le jury.
Mon message aux futurs candidats est simple : vous n’avez rien à perdre. C’est une expérience enrichissante qui apporte énormément sur le plan personnel et professionnel. L’épanouissement est au cœur de ce concours, et rien que pour ça, ça vaut le coup. »
En tant que MOF, quelle est votre responsabilité envers les jeunes générations et vos collègues ?
Alban Aupée : « Aujourd’hui, il est difficile pour moi de suivre le rythme, mais je tiens à accompagner les jeunes qui intègrent notre agence. Dès qu’un nouveau arrive, je suis là pour lui donner des conseils, lui transmettre des documents utiles et l’aider dans son quotidien de technicien.
Je retourne souvent sur le terrain pour montrer certaines techniques et donner un coup de main. J’aime ça. Car en aidant un jeune, je pense aussi à mes propres enfants : j’aimerais qu’ils soient, eux aussi, accompagnés par un ancien. Mon père m’a aidé, lui-même a été aidé avant moi, et ainsi de suite. C’est dans la logique des choses.
Si vous êtes jeune, passionné et que vous souhaitez évoluer dans un univers technique, lancez-vous dans les concours MAF et MOF. Ces expériences ouvrent des portes et permettent de s’épanouir dans l’industrie ou le tertiaire. C’est un milieu passionnant.
J’ai accepté cet entretien avant tout pour les jeunes. Aujourd’hui, la principale difficulté des entreprises du secteur technique est de recruter de nouvelles ressources. Nous avons du mal à attirer les jeunes, et parmi ceux qui arrivent, seuls 50 % restent et s’intègrent dans le métier. Ceux qui n’accrochent pas, soit ce n’était pas leur voie – ce qui est respectable – soit nous n’avons pas réussi à leur transmettre notre passion et à leur faire comprendre les enjeux.
C’est un métier de passion, un métier qui demande du temps et de l’investissement. Mais cette passion génère des résultats concrets pour notre avenir à tous. »
Le concours d’ « Un des Meilleurs Ouvriers de France » est une compétition prestigieuse qui récompense l’excellence professionnelle dans de nombreux métiers : artisanaux, industriels, gastronomiques et artistiques en France. Il permet l’obtention d’un titre diplômant de Niveau V, qui valorise les compétences appliquées en situation de travail. C’est la reconnaissance d’un savoir-faire exceptionnel et une marque d’excellence pour la suite de votre parcours professionnel.
🔈 Les inscriptions au concours sont ouvertes jusqu’au 30 juin 2025.
Pour plus d’informations :
– visitez le site du COET-MOF
– retrouvez-vous les dates clés du concours dans le parcours candidat