Concertation planification énergie-climat : la contribution de FEDENE Déchets-énergie

La Stratégie nationale bas-carbone (SNBC) et la Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) forment le socle de la transition énergétique et climatique de la France. Révisés tous les 5 ans, ces plans visent la neutralité carbone d’ici 2050 et l’adaptation au changement climatique dans tous les secteurs. Dans ce contexte, le Gouvernement lance une large consultation publique dans le cadre de cette programmation énergie-climat.

Principaux enjeux du secteur de la valorisation énergétique des déchets

Transition énergétique : rôle et perspectives des unités de valorisation énergétique (UVE)

Dans le cadre de la transition énergétique, les UVE occupent une position stratégique en conciliant gestion des déchets et production d’énergie renouvelable. Grâce à leur chaleur fatale, stable et continue, elles renforcent la résilience des systèmes énergétiques.
En 2023, les UVE ont généré 3,7 TWh d’électricité et 12 TWh de chaleur, dont 9,3 TWh ont alimenté les réseaux de chaleur, représentant près d’un tiers de leur apport total (sources : SVDU, SDES, SNCU). Toutefois, la PPE3 manque d’une trajectoire claire pour valoriser cette chaleur. Une définition précise de la répartition entre énergie de récupération et énergie renouvelable issue des UVE est indispensable.
À l’horizon 2030-2035, une production d’énergie complémentaire ENR&R devrait être accessible. Selon les données de 2024 (du SVDU et du CEREMA), il est estimé que la filière pourra générer 7 à 9 TWh supplémentaires par an à cette échéance sur le parc existant, grâce à l’extension des raccordements et à la densification des réseaux. Cette énergie viendra alimenter des réseaux urbains ou industriels à l’échelle nationale, portant l’injection totale dans les réseaux à 16-18 TWh par an d’ici 2030-2035.
Ainsi, la filière UVE peut contribuer activement à l’atteinte des objectifs de récupération de chaleur en soutenant des projets variés, de différentes tailles, dans un maillage territorial stratégique. Ces initiatives participeraient non seulement à l’accélération du développement des réseaux de chaleur, mais également à l’attractivité des territoires, en favorisant la création ou le développement de projets industriels grâce à l’offre d’une énergie vertueuse.
Des obstacles persistent : de nombreux projets peinent à émerger ou avancent lentement faute d’un accompagnement adapté.

Cette situation affecte particulièrement les petits projets, notamment ceux portés par les industriels locaux et les agriculteurs, qui souffrent d’un manque criant de soutien structurel et financier.
Par ailleurs, le Fonds chaleur, pourtant conçu pour encourager la valorisation de la chaleur, reste inaccessible aux UVE ce qui limite les possibilités de financement pour des équipements permettant de récupérer la chaleur fatale produite, qu’elle soit utilisée en interne ou redistribuée à des usages externes
Pour atteindre les objectifs fixés, il est impératif de définir des règles simples, prévisibles et pérennes pour le traitement des demandes de certificats d’économies d’énergie (CEE) dans le cadre des projets d’UVE. Cela nécessite la mise en place de dossiers adaptés aux spécificités de ces projets. À défaut de pérenniser ce dispositif ou de garantir un soutien efficace via les CEE, la profession demande la réintégration de ces projets au Fonds Chaleur. Un soutien financier approprié permettra à la filière UVE de jouer pleinement son rôle dans la transition énergétique et de contribuer à une gestion durable des déchets.
Enfin, pour valoriser la chaleur fatale issue des UVE au profit des industriels, la création d’un fonds assurantiel est nécessaire. Ce mécanisme couvrirait les risques liés à la disparition ou à la réduction des besoins en chaleur, en offrant des subventions pour trouver un débouché alternatif, garantissant ainsi que cette ressource continue d’être valorisée plutôt que perdue.

Place des unités de valorisation énergétique dans la SNBC 3

Le SVDU regrette l’absence de corrélation entre la PPE3 et la SNBC3. En effet, la SNBC3 fixe un objectif de 12 millions de tonnes de déchets à valoriser énergétiquement à l’horizon 2030. La profession anticipe les évolutions liées à la gestion des DNDNI1, notamment sous l’effet de la loi AGEC (tri à la source des biodéchets, etc.). Toutefois, les analyses du SVDU révèlent que les tonnages de DNDNI destinés à l’incinération devraient se maintenir, voire augmenter, à l’horizon 2030-2035.
À ce titre, 28 (nombre non exhaustif) projets d’extension et de construction

en cours ou en réflexion sur le territoire français permettraient de traiter 872 000 tonnes supplémentaires en UVE d’ici 2030-2035.
À l’horizon 2030-2035, le SVDU estime que 15 Mt de déchets pourraient être valorisés énergétiquement dans les UVE, tout en respectant la hiérarchie des modes de traitement des déchets. Cette trajectoire souligne l’importance d’intégrer de manière cohérente les objectifs de la PPE3 et de la SNBC3 afin d’assurer une gestion durable et optimisée des déchets, tout en répondant aux enjeux énergétiques

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Enjeux pour la décarbonation du secteur

La décarbonation du secteur des déchets nécessite une approche ambitieuse et collaborative, intégrant les technologies CCUS (capture, transport, stockage et utilisation du CO₂) et des infrastructures adaptées : réseaux de transport, capacités de stockage et débouchés économiques pour le CO₂ capté.
Le SVDU souligne l’importance de mettre en place un système de comptabilisation des émissions négatives et évitées, tout en l’accompagnant d’un cadre de valorisation économique adapté. Ce dispositif doit considérer le caractère biogénique de plus de 50 % du CO₂ émis par les UVE et les chaufferies CSR. Il garantirait une réduction nette des émissions et encouragerait la décarbonation via un marché incitatif.
Par ailleurs, ce système contribuerait à sécuriser les investissements indispensables à la transition énergétique, tout en stimulant le développement et l’industrialisation des technologies CCUS. Ces dernières demeurent aujourd’hui freinées par des contraintes économiques liées aux économies d’échelle, qui limitent leur déploiement à grande échelle.

Pour atteindre les objectifs de décarbonation du secteur des UVE, l’intégration au système EU ETS n’apparaît pas comme une solution efficace pour réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES). En effet, les UVE n’ont pas la maîtrise du flux de déchets entrant, ce qui rend ce mécanisme peu adapté à la réalité de leur fonctionnement. Il serait donc pertinent de concevoir un dispositif spécifique, mieux adapté aux particularités de la gestion des déchets.
Enfin, l’intégration des UVE dans la taxonomie européenne est indispensable pour assurer leur développement, leur modernisation et leur contribution à une gestion durable des déchets, tout en renforçant la transition énergétique et la lutte contre le changement climatique. Cela permettrait de coordonner efficacement les efforts de décarbonation, en ligne avec les objectifs climatiques à l’horizon 2030 et 2050, tout en renforçant la lutte contre le changement climatique grâce au CCUS.

Contribution essentielle du CSR à la décarbonation

Le SVDU souligne que les Combustibles Solides de Récupération (CSR) sont une ressource stratégique pour la décarbonation industrielle. Locaux et à faible empreinte carbone, les CSR remplacent les énergies fossiles, réduisant ainsi significativement les émissions de gaz à effet de serre. Leur double rôle – valorisation énergétique des déchets et réduction de l’enfouissement – en fait un levier indispensable pour la transition écologique.
Le SVDU appelle à reconnaître le CSR comme une énergie bas carbone, en tenant compte des émissions de CO₂ évitées grâce à la diminution de l’enfouissement et à la substitution des combustibles fossiles.
Tout en saluant l’objectif de 10 TWh de production d’énergie CSR d’ici 2030, fixé dans le projet de PPE3, le SVDU alerte sur la lenteur du développement de cette filière, insuffisante pour réduire l’enfouissement et respecter les objectifs de la loi AGEC.
Les CSR jouent un rôle clé sur deux plans :
1. Valorisation énergétique : Réduction de la dépendance aux énergies fossiles pour les industriels et collectivités.
2. Gestion durable des déchets : Contribution à la réduction de l’enfouissement et aux objectifs environnementaux.

Pour structurer la filière, un financement annuel de 150 à 200 millions d’euros sur 4 ans via le Fonds Économie Circulaire (ADEME) est essentiel pour les projets. Le SVDU déplore la baisse des crédits et l’arrêt des subventions CSR, compromettant le développement de la filière et la gestion des déchets. Enfin, la mise en place d’un dispositif de soutien est recommandée pour compenser un écart de compétitivité avec les énergies fossiles et ainsi éviter leur recours par l’industriel.
Le SVDU préconise une mobilisation accrue des CSR, en tenant compte des disparités entre les régions productrices et consommatrices. Les CSR doivent être acheminés vers les zones où leur utilisation génère une véritable valeur ajoutée. Cette démarche vise à renforcer l’attractivité et la durabilité des territoires, tout en optimisant les ressources disponibles et en participant activement à la transition énergétique nationale.
Il appelle à des actions concrètes et immédiates pour valoriser la filière CSR, accélérer son développement et contribuer à une transition énergétique durable ainsi qu’à une gestion responsable des déchets.

Conclusion

En conclusion, l’énergie produite à partir des déchets présente, à bien des égards, des avantages pluriels :
• Une énergie bas-carbone disponible rapidement pour contribuer à la décarbonation des territoires
• Une énergie produite localement, contribuant donc à la souveraineté énergétique de la France
• Une énergie pérenne et une gestion locale des déchets

Un fonds assurantiel dédié à la chaleur fatale et un dispositif de soutien aux CSR sécurisera les investissements, atténuera la concurrence des combustibles fossiles et soutiendra le développement durable de la filière en accord avec les objectifs environnementaux et énergétique. De plus, le SVDU plaide pour une économie circulaire du CO₂, valorisant les émissions négatives et irréductibles via le CCUS, tout en développant des débouchés pérennes. Le SVDU souligne l’importance d’accompagner les projets et écosystèmes pour assurer leur viabilité économique et de promouvoir la recherche et le développement pour améliorer les technologies liées au CO₂.

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